samedi, 3 novembre 2007

INDE : DEUX REGARDS



Voila voila, on n'est pas supers contents mais bon, on quitte l'Inde aujourd'hui... On retourne en Thailande, ou la vie est plus simple pour nous. Dommage, mille fois dommage, c'est clair, mais il ne nous etait plus possible de rester dans ce pays, pour differentes raisons que nous avions envie d'expliquer ici. Un pays, donc, et nos deux regards pour deux experiences uniques et marquantes. L'Inde, eh oui, c'est po facile...

BISOUNOURS ATTITUDE

L’Inde n’est pas tendre avec les voyageurs, c’est une chose que je savais avant d’arriver ici il y a deux mois, pour y etre allee une premiere fois il y a quatre ans. Je savais qu’elle vous attrape la quand et ou vous ne vous n’y attendez pas, qu'elle vous secoue comme un prunier.

Il y a les difficultes que je pensais pouvoir gerer pour les avoir connues avant, auxquelles je pensais pouvoir m’habituer. Mais l'Inde, c'est comme un oignon. Et quand on commence a le peler, eh ben, ca pique vachement. Parce qu'il faut se dire qu'en deux mois on a le temps d'enlever quelques couches. Les grands classiques d'abord. Misere en-direct-live-pan-dans-la-tete, on connait, merci, mais ca reste toujours quelque part, ces petites images d'horreur surrealiste et de misere devorante, litteralement: les mains d'abord, le visage ensuite. Pollution : Calcutta, Calcutta, Calcutta, comme dans un bocal. Les conditions sanitaires hautes en couleurs et en parfums a vous retourner les entrailles sur le trottoir. La route - attention un glissment de terrain! un chauffeur de bus ivre! des vieillards qui cassent des pierres sur le bord d'un precipice! - qui vous brise le corps, des heures durant. Les sollicitations perpetuelles, les arnaques, les pieges de toutes sortes : on a des yeux partout pour denicher la tuile, on prend soin de l'autre, on prend peu de repit. On surveille sa paranoia galopante.

Oui, ca on peut gerer, oui, enfin, je crois. Et puis, mesdames et mesdemoiselles, il y a les hommes, qui balancent leurs regards sur vous comme des tomates au spectacle. On se sent nue, agressee, parfois humiliee aussi par leurs telephones portables qui vous capturent en douce, par cette perpetuelle frustration qui transpire de leurs yeux, de leurs sourires. Femmes indiennes, qui subissez en sous-marin les agressions quotidiennes, du mari, du voisin, du chauffeur de taxi - silence, elles l'ont bien cherche non? - je vous plains et espere qu'un jour c'est un autre rapport qui regira les relations entre homme et femmes dans ce pays. Ca, on gere encore? Oui, non? On commence a avoir une grosse boule dans l'estomac.

Et puis il y a la couche de la violence, que l'on experimente d'abord soi-meme. Pour acheter un billet de train ou pour monter dans un bus, on se bat, souvent, physiquement. Sinon, on ne va nulle part, reellement. Et quand on a experimente ca, on a une toute petite minuscule fenetre ouverte sur la violence de l'Inde, sur la brutalite des rapports entre les gens, sur le systeme ahurissant des castes qui fait que les nantis ont bien raison de mepriser les pauvres. Et que les pauvres n'ont qu'a la fermer. Apres huit moi de route, on a bien eu le temps de s'ouvrir les yeux et d'etre pares pour recevoir cette violence en pleine figure. Mauvais calcul?

C'est trop pour moi. L'oigon explose et moi je pleure. Deux mois, c'est bien suffisant pour me laminer la tete. Je suis la, Bisounours errant, dans un autre univers que je ne comprends pas, decidement pas a ma place, et rien n'aurait pu m'y preparer, meme le voyage, alors il faut partir mais ... il faudra encore frotter cette sensibilite exacerbee aux epines de l'Inde. Bisounours n'en n'a pas fini avec elle.

"Je reviendrai, declare le Bisounours en levant un poing rageur, oui, je reviendrai!"

Alinours


MA PART DU REGARD


L'Inde est magnifique, mais ! L'Inde est eblouissante, mais ! L'Inde ahhh l'Inde ! Voila que cela fait trois fois que je viens dans ce pays et je persiste, elle est EBLOUISSANTE. Cependant, dans cette eblouissement de paysages, d'arts, et de cultures, la lumiere se tamise petit a petit par mon experience de 9 mois de voyage.

En effet, pour partir et supporter le changement, tu dois t'ouvrir, degrafer d'un coup pour certains et doucement pour d'autre, la carapace de tes perceptions. Rien de bien nouveau mais l'ouverture fragilise d'abord, avant de donner toute sa puissance. Et petit a petit, pays apres pays, tu te rends comptes que tu ne supportes plus certaines choses. Tu es evidement etonne car tu pensais que tu te renforcerais par l'habitude, mais que neni. Tu continues a t'ouvrir car tu aimes les gens, tu aimes decouvrir de nouvelles vies, de nouveaux comportements, de nouveaux paysages, de nouvelles cuisines, de nouvelles experiences. Oui tu aimes cela ! Mais voila, une fois de plus l'Inde se tamise et tu recois un coup de genou exactement ou tu ne t'y attendait pas.

D'abord, les paysages que nous avons eu la chance de voir ont ete une experience unique. La nature presque a l'etat pur dans les montagnes et la beautes des gens qui arrivent vivre AVEC elle et non d'elle, te facinent. La difficultes de ces regions reculees te poussent a respecter la nature car sinon, c'est simple : tu meurs ! Mais ces gens ont choisi d'y vivre malgre la rudesse du climat et cela ma sincerement impressionne et touche.

Ensuite, et malheureusement rapidemment, comme tu arrives a etre attentif a ce qui t'entoure, tu vois des choses qui ne te plaisent pas. Les regards des Indiens sur toi ne sont pas trop durs encore, mais sur Aline......., tu te sens alors le besoin de proteger. Meme si ce role peut paraitre plaisant et un peu flatteur, tu arrives au point de te battre avec quelqu'un pour cette attaque visuelle continuelle. On pourrait penser que cela est l'Inde et qu'il faut s'habituer, mais cela est strictement interdit pour un Indien de regarder dans les yeux une femme de son pays, y compris des castes inferieures ! Alors quoi faire, te mettre sur la gueule de celui qui n'aura pas compris que c'est une atteinte a ta personne ? Moi, je dis non ! Je ne suis pas la pour vivre cela. Je ne suis pas la non plus pour perdre toute mon energie a me battre contre un grand nombre et pour finir, ne plus distinguer la personne qui sort du lot. Car je ne la vois plus, celle qui sort du lot. Celle qui te donne et ne te prends pas, celle qui partage et qui te sourit un instant et le monde est alors bon. Je ne la vois plus et je suis triste.

Oui, je suis dans des sentiments basiques et peut-etre niais. Mais je m'en fous. J'aime voyager pour apprendre. Et la, j'ai appris sur moi !

J'ai appris que l'Inde est trop tamisee pour moi, maintenant, apres 9 mois. J'ai appris que ma faiblesse ne supporte plus les mensonges continuels, les regards de poisson quand le mec de l'hotel essaye de te rouler de 100 roupies apres avoir justement prie son dieu ! La religion est devenu une mascarade pour la plupart des Indiens. Ils ne comprennent pas non plus les filles a moities a poil (indiennes maintenant) sur MTV et cette publicite occidentalisee qui leur font rever de pays et de materiels plus beaux. Leur systeme de caste, incompatible avec la progression personnelle, fait que seule la classe moyenne profite de l'expansion de la richesse economique en Inde. Ils ne comprennent pas que leur quotidien depend d'eux et pas du Karma. Ils ne comprennent pas le principe d'entre-aide et rouleront litteralement sur un intouchable, mais eviteront le chien ! Ils n'ont aucune notion d'environnement et ne s'y interressent pas. Ils ne comprenne pas leur Avenir ! Cela va trop vite !

Voila, la lumiere se tamise encore mais elle est perceptible.... Alors je pars.

Je vais me ressourcer ailleurs. Je pars avant que le faisceau lumineux ne disparraisse. Je reviendrais, plus fort, plus enclin a me battre et pret a mieux affronter l'Inde d'aujourd'hui. Je garde cette lumiere en moi, pronfonde, dans mes entrailles les plus intimes. Le temps fera son travail et, comme a chaque fois, ouvrira la focale a son maximum pour m'attirer telle un insecte saoul et ebloui.

Cedric

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